UNE VISION PARTAGÉE POUR 2020

UNE VISION PARTAGÉE POUR 2020

Lors de la conférence de presse du 18 février dernier, en présence de Leela Devi Dookun-Luchoomun, Ministre de l’Education, l’ONG TIPA a annoncé son programme pour les 5 années à venir. Retour sur le processus participatif qui a conduit à jeter ces nouvelles bases de travail, avec Angélique de La Hogue, Programme Manager de TIPA.

Quelques chiffres sur l’action de TIPA (Terrain for Interactive Pedagogy through Arts) depuis 2007 ?
Depuis la création de l’ONG en 2007, TIPA a impacté plus de 1700 enfants vulnérables, 600 enseignants et 50 éducateurs d’autres ONG. Nous avons également travaillé en collaboration avec plus de 100 artistes et 200 volontaires.

Le programme 2016/2020 que vous rendez public, n’est pas le fruit uniquement de la réflexion de votre équipe, constituée de 7 employés, du comité et de vos volontaires. Comment cela s’est déroulé en coulisses ?
Depuis 2007, l’implication de nos bénéficiaires et la prise en compte de leurs recommandations a toujours tenu une place importante dans la réflexion stratégique et la conception du programme. Pour nous, la notion d’empowerment est primordiale, l’acteur doit sentir qu’il a le pouvoir de changer sa vie.
TIPA a donc entamé un shift profond en mettant davantage de temps et d’énergie dans un large processus consultatif. Nous partons du principe que notre équipe ne sait pas précisément ce qui est bon pour les bénéficiaires, nous devons plutôt  voire avec eux ce qu’ils ont besoin. Emilie Carosin, chercheur en Psychologie et Education , a impulsé cette nouvelle manière de faire, qui nous a amené à être encore plus à l’écoute des enfants, des parents, des enseignants, des éducateurs, des artistes, des volontaires, des ONG partenaires, des financeurs, des représentants du Ministère de l’Education.

Comment s’est passé concrètement la récolte d’idées ?
Avec les outils développés par une ONG anglaise (Keystone) , nous avons cherché à identifier ensemble le changement qui serait nécessaire pour chacun des acteurs. Et nous avons abouti à notre vision du succès partagée que « chaque parent, enfant, enseignant, et le ministère travaillent ensemble pour aider chaque enfant à réaliser son potentiel et à participer au développement du pays ».
Nous avons demandé à des focus groupes comment ils se projettent dans l’avenir, à quelle société ils rêvent pour demain, quels projets-phares pour l’éducation ils imaginent… Ces inputs ont permis à TIPA de concevoir le programme sur les 5 ans à venir. Un des objectifs est de créer du lien entre les acteurs et de les réunir sur des plateformes de participation.

A quelle échelle ?
Nous avons identifié différents niveaux, différentes plateformes d’intervention :

  • La classe  : nous intervenons actuellement auprès de 275 enfants, qui participent activement dans les classes de créativité. Ils y apprennent à développer des valeurs citoyennes telles que l’esprit critique, le respect des autres et des règlements.
  • L’école : actuellement nous travaillons au sein de 3 écoles primaires ZEP (à Tranquebar, Cité Vallijee et Pointe-aux-Sables). Notre ambition : appliquer notre Programme dans 6 écoles d’ici 2020.

Au sein de l’école, nous avons souligné le besoin de créer un Child Protection Protocol, qui vise à aider les différents acteurs à référer un enfant, en fonction de ses difficultés (physiques, sociales, psychologiques …). Et avec les professeurs, nous devons être en mesure de mieux connaître le quotidien de l’enfant. Un exemple bien concret partagé par une enseignante: un élève de primaire ne parvenait pas à rester assis sur sa chaise. Or, lors d’une visite à la maison, l’enseignante a compris que la famille ne possédait pas de chaise. TIPA souhaite donc faciliter des visites à domicile avec les enseignants.
Nous remarquons aussi le besoin de souder les différents acteurs de l’école, en organisant un teambuilding chaque année .

  • La communauté scolaire : actuellement avec les clubs de parents, nous donnons aux parents d’élèves un espace pour s’exprimer et un temps pour se détendre à travers l’art. Les animateurs de TIPA organisent des activités artistiques, qui ont aussi pour vocation d’être reproduites avec l’enfant à la maison. A la rencontre suivante du club des parents, il y a un partage sur comment s’est déroulée cette activité à la maison.
    Nous avons aussi comme projet, à la demande des élèves et des parents, d’organiser des activités artistiques au sein des quartiers (en dehors de l’école) en rassemblant des volontaires, des artistes et des anciens élèves de TIPA, qui ont envie de s’impliquer davantage. Seul hic, pour déployer une équipe mobile, nous aurions besoin d’une petite caravane pour déplacer le matériel… Cela va demander des financements supplémentaires…
  • Sur le plan national : TIPA souhaite renforcer ses capacités à travailler en réseau, pour le plaidoyer notamment. Nous souhaitons élargir nos cercles. L’ONG est déjà impliquée au sein du Kolektif Drwa Zanfan Morisien.

Nous partageons aussi nos connaissances et nos outils avec d’autres ONG à travers la formation Facilit’art. Cette année, nous avons 21 inscrits pour ce programme. Avec la ZEP Unit, nous participons à des activités de transmission avec les professeurs, au sein du Continuous professional Development Programme et aussi par le biais des interventions de TIPA au Mauritius Institute of Education (MIE).

Autre grand projet sur le plan national, votre site web, pour la transmission des connaissances et la création de contenus ?
Oui, nous avons lancé le 18 février notre nouveau site web www.tipa.mu, qui propose une plateforme de partage en ligne, des outils pédagogiques. Nous aurions pu facilement download toutes nos activités passées et mettre ainsi en ligne un portfolio d’activités. Mais nous trouvons plus pertinent que ce portfolio soit créé avec le maximum d’acteurs. Nous allons débuter avec les participants à la formation Facilit’art en cours. Cela va prendre du temps d’impliquer les différents partenaires, mais cela s’inscrit parfaitement dans notre démarche… qui rejoint la démarche participative et la théorie du changement !

La théorie du changement ?
La «Théorie du changement» est un terme qui a connu une croissance exponentielle au cours des dernières années, principalement dans le domaine de la planification et de l’évaluation des ONG. Elle définit une approche centrée sur les stratégies de l’ONG pour atteindre certains résultats formulés en termes de changements, plutôt que sur les réalisations des projets. Elle est enracinée dans une vision à long terme, qui inclut la participation de la majorité des intervenants d’une manière démocratique. Cette approche met l’accent sur les processus changeants plutôt que sur les résultats : l’objectif est d’améliorer l’impact de l’intervention.
Voilà pourquoi, TIPA a l’intention de procéder à un nouveau programme avec des activités qui  favorisent le changement au niveau des principaux bénéficiaires : les enfants, les enseignants et les parents (individuel et interpersonnel) et aussi au niveau des partenaires : projet ZEP, Ministère de l’Education et d’autres organisations impliquées dans les interventions.

Quel impact visez-vous avec ce programme 2016-2020 ?
D’ici 2020, nous projetons d’impacter : 6 écoles ZEP, 590 enfants vulnérables, 125 parents, 400 enseignants des écoles ZEP et 300 autres enseignants et éducateurs. A travers la formation des enseignants, nous impacterons encore plus de 11,000 enfants dans cette période de 5 ans. Le fait de l’annoncer, nous engage davantage à réaliser nos objectifs. TIPA compte une petite équipe de 6 professionnels motivés et dynamiques.

Et de quel budget vous disposez ?
Ce programme d’envergure nécessite le recrutement d’autres animateurs mais pour l’instant nous n’en n’avons pas les moyens financiers. Notre budget est de Rs 7 millions par an et pour l’instant, nous n’avons pas réuni les fonds nécessaires pour cette année. L’appel aux sponsors est donc lancé !

Verbatim…
Ministre de l’Education, Leela Devi Dookun-Luchoomun : “ […] je saisis ici l’occasion qui m’est offerte (NDLR : lors de la conférence de presse du 18 février 2016)  pour dire mon appréciation à l’ONG TIPA et à ses collaborateurs pour le travail abattu à ce jour, un travail contributif visant au développement de la société mauricienne. … Je souhaite aussi dire mon appréciation aux autres parrains de l’ONG TIPA pour leur contribution reconnue à l’éducation. Je salue cette collaboration entre mon Ministère et TIPA qui ne date pas d’hier. Et ensuite, […] il y a la collaboration avec le MIE.  Cette collaboration a pris la dimension d’un échange constant et régulier d’idées, d’expériences  et des outils pédagogiques lors des séminaires de formation au MIE. Cela revêt une importance capitale.”
Ambassadrice de l’Union Européenne à Maurice, Mme Marjaana Sall  : “Education and training play an essential role in reducing poverty and in development. Education is the best investment against exclusion and inequality, and contributes to national cohesion. It provides essential skills and the tools to actively participate in society.  It is through education that you can have a better workforce in order to fight poverty.”

Source: https://www.actogether.mu/fr/actus/2016/une-vision-partagee-pour-2020